Du lundi 30 mai au lundi 6 juin 2022 : Lemnos-Samothrace-Lemnos

Tout d’abord merci à toutes pour vos commentaires !

En particulier, merci à Marie-Noëlle qui me signale une erreur fréquente mais indigne, celle de dénommer « mouette » le goéland !

D’autant plus impardonnable que les différences morphologiques sont flagrantes et nombreuses, couleur et forme du bec, couleur des pattes, envergure...bref aucune excuse pour les gens de bateaux qui aiment observer la nature si ce n’est une facilité ordinaire de langage !

Donc, à Kira Panaya, c’est bien sous l’œil indifférent d’un goéland que nous sommes partis !

Finalement ce sont bien plus souvent des goélands que des mouettes que nous rencontrons !

Je reprends le fil de mon récit au lundi 30 mai, où, une fois le vent calmé, nous avons quitté Diapori pour le Nord de Lemnos.

En milieu d’après-midi, après avoir viré le Cap Mourtzelos, l’extrémité Nord Ouest de Lemnos, nous sommes passés sous l’îlot Sidheritis pour virer à tribord dans le très beau mouillage de Gomati.

ATTENTION !
Ici toutes les cartes sont fausses. En effet, deux îlots qu’il faudrait largement contourner à l’entrée Nord Ouest de la baie, sont mentionnés. Or dans la réalité il y a bien un premier îlot puis, à l’emplacement approximatif du deuxième, un très large haut-fond, peu visible. Mieux vaut suivre la sonde des 10 mètres en progressant franchement vers l’Est et poster un équipier sur le pont. Ensuite, derrière le haut-fond, sur fond de sable fin, les sondes sont plus élevées que mentionnées sur les cartes !

Mais ça vaut la peine de faire un petit effort pour goûter la beauté et le calme de cette baie splendide !

Ici, nous ne sommes qu’à 35 miles de Samothrace qui se découpe franchement sur l’horizon Nord. Un autre amer naturel dans le Nord de la mer Egée. Cette petite île est une haute montagne, qui culmine à plus de 1600 mètres d’altitude et tombe sans fioritures dans la mer !

Le mont Feggari autrefois appelé Saos, occupe toute l’île ! La légende veut que Poséidon a suivi les péripéties de la guerre de Troie, assis sur le mont Saos, aux premières loges !
Samothrace, un amer remarquable !
DSCN0922.JPG, juin 2022

Mardi 31 mai, à 7h15, nous quittons Gomati et Lemnos pour Samothrace : le vent est plutôt calme, la mer est lisse. Nous alternons voile et moteur et nous amarrons au quai de Kamarotissia vers les 13h.
A l'approche de Samothrace
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Nous y retrouvons Cherry et Hugh, l’équipage très sympathique d’un bateau anglais croisé à Moudros.

A Samothrace, pas de mouillage, les 60 kilomètres de côte ne proposent aucun abri.

Au Nord de la langue de terre plate qui prolonge la pointe Ouest se niche le seul port de l’île, Kamariotissa.
Le quai de Kamariotissa
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C’est un assez grand port de pêche et port commercial où rien n’est prévu pour la plaisance, même si l’extrémité du quai Ouest accueille les bateaux de passage. Ce jour-là nous sommes 5 voiliers, désireux de visiter ce cailloux au nom mythique, du moins pour les français !

En effet, c’est bien nous, ou plutôt monsieur Charles Champoiseau, consul de France, qui avons découvert en 1863 une des plus célèbres et des plus belles statues géantes de l’époque hellénistique : la victoire de Samothrace. C’est une magnifique représentation de la déesse Niké, déesse de la victoire. L’histoire de sa reconstitution complète est très intéressante. Lorsque la statue (d’environ 2,75 m) est posée sur son socle (la proue d’un navire de guerre) l’ensemble fait plus de 5 mètres de haut. Bien évidemment, vous ne pouvez pas admirer cette victoire à Samothrace mais...au Louvre ! A cette époque, la fin du 19 ème siècle nous ne nous embarrassions pas de savoir si c’était normal de s’approprier ces trésors…

Derrière la jetée de Kamariotissa il fait très chaud ! Nous sortons le grand taud de soleil !

Alors que nous émergeons d’une sieste un peu comateuse, les autorités portuaires viennent nous trouver (nous les cinq voiliers) pour nous expliquer qu’un bateau de guerre risque de rentrer au port et que, dans ce cas, il a besoin du quai que nous occupons. Ça n’est pas certain parce que, avec les bateaux de guerre c’est comme ça, ils sont très secrets, aucune certitude...nous devrions être fixés vers 19h !

A 20h, pas de nouvelles, nous pensons être tranquilles, nous louons même une voiture pour le lendemain. A Kamariotissa, c’est facile, vous signez un papier et on vous donne les clés !

De retour au bateau, nos amis anglais nous informent qu’il faut se déplacer, changer de quai !

Du coup nous partons pour une navigation de nuit dans le port de Samothrace !

Mais...nous sommes sur le quai du ferry, assez proche de sa rampe de débarquement !

On verra demain !

La nuit est calme, le bateau de guerre est bien arrivé, à 7h du matin les autorités ne sont pas encore levées et le ferry n’arrivera pas avant 17h. Nous avons donc toute la matinée du mercredi 1er juin, au moins, pour partir en visite ! Nous partons avec Cherry et Hugh  !

Je précise juste qu’aucune route ne fait le tour complet de l’île : la partie Sud Est entre Pahia Amnos et le Cap Kipos n’est pas desservie ! Donc rien n’est loin, ce qui ne veut pas dire que les voies d’accès soient toujours faciles et rapides ! Nous empruntons d’abord la route Nord.

Notre premier arrêt : Paleopolis, ce qui signifie la cité ancienne.

Pour cette toute petite île, nous nous attendions à un site archéologique modeste. Or, c’est une grande cité antique pré-hellénique puis hellénique qui a été mise au jour...et encore, toute la montagne n’a pas été fouillée ! Il nous a bien fallu deux heures pour faire le tour du site et apprécier l’importance qu’a dû revêtir Samothrace dans le passé.

On y retrouve tous les éléments d’une cité puissante, des constructions en pierres massives, un système adduction d’eau sophistiqué, un théâtre, un forum, une rotonde (structure originale dans la Grèce antique, pour laquelle on n’a pas de certitude quant à la fonction) et un sanctuaire des Grands Dieux. C’est un culte particulier, une religion à mystères avec plusieurs niveaux d’initiation. Elle était réputée pour protéger les marins. Je suis immédiatement devenue une nouvelle adepte !
La rotonde
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Le théâtre
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Le sanctuaire des Grands Dieux
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Les nouveaux adeptes
20220601_093322.png, juin 2022

Le petit musée qui abrite quelques éléments précieux propose également une reconstitution virtuelle (avec couleurs, fenêtres, toits...) des bâtiments mis au jour. C’est très parlant et très intéressant.

Après cette visite, nous continuons notre route jusqu’à Therma. Près d’anciens thermes, un petit port moderne a été construit sur fonds européens. Il aurait pu être une réponse pour les plaisanciers de passage en quête d’amarrage sûr. Hélas, le port s’envase ! On a oublié de mettre l’eau ! Là encore, corruption, incompétence, je-m’en-foutisme, un peu des trois, font qu’à peine terminé, c’est une friche. Par temps très calme, Doug Le, qui cale 1,95m, doit pouvoir rentrer en longeant le côté droit de l’ouverture ! Par grand vent de Nord (dominant), impossible de tenter la manœuvre. Mais après, de toute façon, autour, il n’y a rien !
Dommage !

Therma, si joli de loin
DSCN0946therma.JPG, juin 2022
Entrée impraticable !
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Après notre matinée de visite touristique, nous repassons par le port. Mon capitaine, toujours soucieux, veut savoir si nous devons changer de place avant la venue du ferry.

La réponse des autorités est la suivante : si vous vous amarrez à couple, ça ira très bien...ce que nous nous empressons de faire avant de repartir...déjeuner dans un premier temps !

La spécialité de l’île : le chevreau et encore le chevreau ! Nos amis anglais qui sont déjà venus à Samothrace disent qu’il faut absolument aller goûter le chevreau au « Goat Center » !

C’est un restaurant doté d’une grande terrasse ombragée par de gigantesques platanes d’Orient. Il se situe dans le village de Profitis Ilias. Il est caché dans la montagne. Hugh, qui fait le copilote nous y fait arriver par le chemin des « chèvres » ! C’est difficile pour notre C3 de location mais superbe !

Le chevreau grillé est à la hauteur de sa réputation !

Après ce bon repas une petite « trempette » s’impose : arrêt à Samotraki Beach ! Enfin, plage, c’est beaucoup dire ! C’est une bande de galets ! Mais fraîcheur et transparence sont là !

Nous terminons notre tour par la Chora. En Grèce, les Choras dans les îles, sont des villages perchés, au dessus des ports. Autrefois, centres administratifs et religieux, mais aussi place-forte contre les envahisseurs, ces vieux villages sont très souvent adossés à un château ou un monastère. La Chora de Samothrace est remarquable. Elle est construite sur une pente tellement abrupte que chaque rue est une terrasse !
Chora , son chateau
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A notre retour, un troisième voilier est amarré à couple avec nous. C’est un bateau que nous connaissons. Des personnes discrètes qui ont fait un amarrage impeccable.

Notre deuxième nuit à Kamariotissa s’avère difficile.

En effet, nous sommes en quelque sorte pris en sandwich entre le ferry et un gros chalutier, qui tous deux font fonctionner leur puissant générateur pendant toute la nuit : nuisance sonore et pollution aux hydrocarbures garanties ! Heureusement, le vent est calme, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce secteur Nord Est de la mer Egée...nous n’avons donc pas été secoués !

Vous l’aurez compris, Samothrace n’est pas très adaptée à la plaisance, même si sa découverte vaut vraiment la peine !

Jeudi 2 juin, nous quittons le quai et saluons nos amis, qui eux naviguent vers le Nord et nous vers le Sud, retour Ă  Lemnos.

Le vent nous accompagne sur la première partie de la traversée, puis nous abandonne et nous permet d’achever notre journée à la voile, le long de la côte Ouest de Lemnos.

Nous jetons l’ancre à Plati une grande baie au Sud de Mirina.

Elle est très protégée et, en début de saison, calme et peu encombrée...plus tard, je ne vous la recommanderais pas. En effet, c’est sans doute le site le plus aménagé de Lemnos pour accueillir des vacanciers...tout est prévu pour les amuser, la musique sur la plage et les jouets à voile, à rames, ou motorisés ! Amateurs de calme s’abstenir !
Plati début juin, notre bateau est à droite
20220603_083807.png, juin 2022 Du vendredi 3 au dimanche 5 juin nous resterons bien à l’abri à Diapori où nous pouvons attendre sans angoisse le coup de vent de Nord annoncé.

Dans le coin Nord Est de Diapori, avec 40 mètres de chaîne sur fond de vase...ça peut souffler !

Nous pouvons y profiter de nos amis, attablés ensemble à la taverne de la plage, un œil sur le bateau !
Diapori, depuis la taverne
20220603_200052.png, juin 2022

Chasses et baignades sont également au programme !

Le dimanche, alors que le vent s’est bien calmé nous découvrons ensemble une exploitation d’oliviers. C’est un petit paradis à un kilomètre à peine du bateau.

Les propriétaires qui nous reçoivent, réalisent, à l’âge de la retraite, un projet, un rêve !

Sur une île qui était réputée sans arbres et inadaptée à la culture des oliviers, ils ont planté en quinze ans, près de 20 mille oliviers dont ils tirent aujourd’hui une des meilleures huiles au monde. Ils viennent d’ailleurs de gagner leur première médaille d’Or dans un concours international. Ils ont fait le pari du bio et du naturel ainsi que de la maîtrise totale du processus depuis le choix des variétés d’oliviers jusqu’à la mise en bouteille en passant par la pression à froid. Ils ont également fait le pari que sur leur exploitation à Lemnos ils pourraient être auto suffisants en légumes, fruits, volailles.

Nous visitons une plantation d’oliviers parfaitement tenue et son pressoir à huile, mais aussi le potager, la basse-cour où nous pouvons admirer des dindons, des oie, des paons splendides, des poules aussi bien sûr, le pigeonnier et le verger (des agrumes exclusivement) protégé des vents froids ou chargés d’embruns ! C’est très convainquant !

Nous procédons évidemment à la dégustation de leur huile selon un cérémonial digne des chevaliers du taste-vin.

A la fin de la visite nous avons droit à un buffet délicieux où nous pouvons goûter à tous les produits de la ferme !

Ils ont donc fait la preuve qu’avec beaucoup d’énergie, de travail, d’exigence et...d’investissements, l’excellence dans la culture de l’olivier à Lemnos est possible !

Bien sûr, l’excellence a un prix...40 euros le litre, c’est plus qu’un Saint-Emilion grand cru !

Un peu cher pour un produit de base mais, pour nous quatre, une rencontre particulièrement intéressante !

Nous ne pouvons nous empêcher de penser, le capitaine et moi, que pour réaliser ses rêves il est souvent bien utile d’avoir de bonnes réserves financières ! Comment survivre quand il faut dix ans pour espérer un début de production ? que la rentabilité est aléatoire et que 8 salariés sont nécessaires à la bonne marche de l’exploitation ? Cette réflexion n’enlève rien à l’intérêt ni à la qualité du projet, ni même à l’admiration que j’ai pu porter à ces personnes (certes très riches!) mais surtout exigeantes et travailleuses !

Le dimanche soir nous nous sommes rendus à la fête crétoise organisée à Livadochori, dans le village d’Erik et Nicky, sous les grands mûriers de la place !

C’était magnifique mais il est un peu dommage que les deux musiciens aient amplifiés si fort leurs instruments traditionnels que l’écoute, à travers les haut-parleurs saturés, en était perturbée, voire désagréable !

Aujourd’hui, lundi 6 juin, nous sommes de retour sous la citadelle de Mirina, ravitaillement et plein d’eau obligent !

Diapori par grand calme, avant notre départ pour Mirina
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