Mercredi 20 et jeudi 21 juin

Le mercredi à 8 heures nous quittons l’anse Meloyi à Patmos pour rejoindre, plein Nord, les îles Fournoi (on prononce Fourni).
Le Dodécanèse est derrière nous !

Ces îles sont peu étendues mais très hautes. Trois îles, plus quantité d’îlots, qui portent le nom général de la plus grande d’entre elles, Fournoi, la plus orientale. A l’Ouest, Fimaina, et juste au milieu du chenal entre Fournoi et Fimaina, un îlot en Y, Dhiapori : effet venturi garanti dans le chenal étroit et encaissé.
Ces îles sont réputées sauvages et ventées. En effet, le catabatique qui tombe de ces hautes montagnes renforce à coup sûr le vent dominant par de très violentes rafales, mais...nous avons choisi de les aborder par temps calme afin de les découvrir sans stress.

Nous passons entre les îlots Makronisi et Anthropofagi pour aborder la pointe Sud de Fournoi. Nous remontons le long de sa côte ouest et jetons l’ancre dans la deuxième crique. C’est beau, sauvage, abrupt, comme annoncé dans le guide. Les sondes restent longtemps profondes mais on peut quand même mouiller par 6-7 mètres de fond devant une petite plage.
Le capitaine se sent bien !
Il y a même une antenne visible qui permettra de donner le rituel coup de téléphone du soir à nos mères !
Notre premier mouillage au Sud Ouest de Fournoi
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Dans l’après-midi, nous partons faire un tour sur la crête et, au retour, le vent a tourné, nous présentons l’arrière du bateau à la plage et le sondeur n’indique plus que 2,7 mètres. Nous n’avons plus beaucoup de marge, alors nous changeons de mouillage et nous installons à un mile plus au Nord, dans l’Anse de la Carrière Antique (les anglais disent Quarry Bay).
Cette baie est plus grande que la précédente. Elle offre deux plages, l’une avec une petite chapelle bordée d’un petit quai, l’autre, en galets de marbre ! Une ancienne carrière se tient là, contre la plage. Des morceaux de colonnes, des chapiteaux monumentaux y sont encore, prêts à être embarqués sur le lieu de construction d’un temple...Un jour, tout s’est arrêté, il y a plus de deux mille ans de cela. Il nous reste ces quelques traces.
Les voici
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Dans le soir qui tombe, on remarque deux petites maisons à mi-pente, des arbres et un grand nombre de ruches. En revanche, pas de chèvre !
Peut-être est-ce la seule façon de voir repousser les arbres, troquer les chèvres contre les abeilles !
Je n’ai rien contre les chèvres, notez bien, mais ce n’est sans doute pas un hasard si toutes ces îles sont quadrillées de murs qui datent de l’antiquité. Les anciens qui pratiquaient en même temps élevage et culture sur ces territoires restreints savaient qu’il fallait séparer les deux activités.

Le lendemain nous partons à la découverte des autres criques en remontant vers le village de Fournoi. Puis nous contournons la pointe Sud de Dhiapori, passons devant la petite anse de la côte Ouest de Fimaina où il n’est pas possible de mouiller tellement elle est encombrée de corps- mort, enfin nous embouquons le chenal et jetons l’ancre dans l’anse Vayia, sous le cimetière du village.
L’eau est très claire, ce qui nous permet de constater que le fond de la baie est jonchée de détritus et plastiques dans des proportions que nous n’avions jamais constatées jusque là.
Mais en y réfléchissant, où ont bien pu se déverser les déchets de ce petit village pendant les 50 dernières années ? Comment aurions-nous fait ?
En effet, c’est un tout petit port de pêche, le seul port de l’île Finaima où arrivent petits ferries et navettes. Je ne suis pas certaine qu’il y existe un service pour traiter et évacuer les ordures. Où trouverait-il le budget ?

Nous débarquons pour faire un tour dans le village accroché à la falaise et nous nous retrouvons en haut de la première volée de marches d’escalier, sur la toute petite place du village, attablés devant une bière et des mezzes (l’équivalent grec des tapas), au milieu des gens du coin avec l’équipage d’un autre voilier de passage. C’est un équipage gréco-américain. Des grecs nés à Ikaria (la grosse île juste au dessus) et partis tout jeunes, avec leur famille, pour les USA...aujourd’hui ils reviennent avec des dollars !

Ils nous donnent une bonne information : à Kirikos, le grand port d’Ikaria, il y a une toute nouvelle marina, gratuite...je vous en parlerai plus tard.
Depuis la terrasse de la taverne du village
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Très belle rencontre, toute simple, dans ce village du bout du monde.

Vayia, un village au bout du monde
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Vendredi 22 juin

Après le petit déjeuner, nous quittons Vayia pour un mouillage au Nord de Fimaina, derrière l’îlot Thymainaki, le temps d’une baignade pour moi et d’une chasse pour Jean-Claude.

Nous découvrons une petite anse magnifique. Au fond, sur la plage, une chapelle et une cure, à droite un petit quai, derrière la chapelle un verger en terrasse...de quoi méditer en paix, vraiment loin du monde et de son agitation !
Un havre de paix bien caché au Nord de Finaima
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Mais nous poursuivons notre voyage et laissons ce havre pour rejoindre la ville !

A 12h15 nous sommes amarrés à la fameuse nouvelle marina de Kirikos dans l’île d’Ikaria.

En effet, elle est flambant neuve, abritée de tous les vents derrière une jetée monumentale qui protège aussi le quai qui la relie au port principal.
Les bornes d’eau et d’électricité sont installées, en nombre, mais pas branchées. Les locaux administratifs de la marina sont construits, mais fermés. Personne ne vient vous demander quoi que ce soit, c’est effectivement gratuit. Il faut dire que cette marina est toute petite. On ne peut y loger les bateaux que le long des pontons. Une vingtaine de bateaux de passage, en tout, peuvent y trouver refuge, à condition bien sûr que les petits bateaux locaux n’aient pas déjà investi l’endroit ! C’est une marina miniature ! Alors, pour au maximum 20 bateaux par jour pendant la saison, il n’est sans doute pas rentable de salarier une équipe pour faire fonctionner la marina !

Le besoin existe bel et bien pour les plaisanciers, les subventions européennes ont été versées (presque 10 millions d’euros), la réalisation est achevée...mais pourquoi donc est-elle aussi ridiculement petite et quasi non fonctionnelle ? A ce stade, toutes les hypothèses sont permises : incompétence crasse, corruption, blanchiment...un peu des trois ?

Les subventions
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Pour réaliser une marina miniature
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Et ce n’est pas la première que nous en rencontrons, en Sicile ou en Grèce...quel dommage !
Nous en profitons quand même, car l’endroit est très sûr pour les quelques bateaux qui peuvent y entrer. Pour l’instant elle ne figure sur aucun guide, aucune carte... Je précise qu’il n’y a pas beaucoup d’abris naturels à Ikaria. C’est une grande île montagneuse autour de laquelle le vent souffle furieusement. Même sa côte sous le vent peut devenir infréquentable à cause du catabatique !
Elle doit son nom à Icare. La légende dit qu’il est tombé par là. Heikell, l’auteur de notre guide, propose une interprétation personnelle de la chute d’Icare : c’est le vent déchaîné qui a arraché toutes les plumes de ses ailes lorsqu’il a voulu franchir l’île ! En tout état de cause, que le soleil ait fait fondre la cire qui tenait les plumes entre elles ou que le vent ait arraché toutes les plumes, Icare avait sérieusement mécontenté les dieux !

Quant à nous, nous sommes à Kirikos par temps calme. Le port est très sympathique, sans prétention, il y fait déjà très chaud !

Samedi 23 et dimanche 24 juin

Un peu avant 9h, le samedi, nous laissons Ikaria pour Samos.

Encore une grande île très montagneuse. Sans doute l’île de la mer Egée où l’on trouve les plus hautes montagnes : 1600 mètres d’altitude ! Une bonne performance !

Sur la carte les deux ïles d’Ikaria et de Samos qui s’étirent d’Ouest en Est semblent faire une belle barrière de protection pour le vent du Nord...ce n’est qu’une idée fausse !

Nous nous y rendons à la rencontre de Pythagore et peut-être également de son célèbre vin de Muscat !

Au premier tiers de la côte Sud de Samos, en venant d’Ikaria, on trouve un très joli petit port abrité par une grande jetée : Marathakambos.
Une extension y a été construite, très bien conçue celle-là. Nous culons à quai, un quai bien placé par rapport au vent dominant.

C’est une petite station de bord de mer, charmante, épargnée par le tourisme de masse, arborée. Ici les toitures sont en tuiles, comme dans le Péloponèse.

Le hasard nous fait y arriver juste le jour de la fête locale. De grande tables sont installées sur les quais, les souvlakis (ce sont des brochettes) grillent sur de grands barbecues, une pancarte nous invite à venir partager repas et danse.

C’est une grande fête populaire : 300, 400 personnes. Les gens arrivent de tout Samos !

On commence par manger et boire (les souvlakis sont très bons!)
Très vite, toutes les tables se remplissent et nous accueillons à notre table un couple de Samiotes avec qui nous bavardons en anglais.
Petit à petit les musiciens s’installent. C’est de la vraie musique traditionnelle : un violon, deux luths, des percussions, un clavier, des voix.

Le groupe de danseurs du club de danse, en costumes traditionnels, ouvre le bal : ce sont des farandoles, conduites par un danseur (un mâle, qui improvise des grands pas sautés) !
Au bout de trois danses, ils invitent les gens à venir se joindre à eux et très rapidement tout le monde danse...parce que tout le monde sait danser ! Je n’ose pas me glisser dans le cercle malgré la grande envie qui me tenaille. Mais rien n’est prévu pour apprendre les pas de base aux étrangers...

Très belle soirée !

J’ai un peu de mal à m’endormir !

Dimanche matin, alors que le vent du Nord se met à souffler, une grande flemme me prend !

Je ne veux pas bouger !

Le capitaine se laisse facilement fléchir : aujourd’hui c’est repos à Marathakambos.
Le joli port de Marathakambos
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On verra demain où le vent nous poussera !